Une nouvelle gouvernance pour l'université

Chères étudiantes et chers étudiants, chères et chers collègues,

Par arrêté du 8 juillet 2020, le recteur de la région académique d’Ile-de-France, chancelier des universités, m’a nommé administrateur provisoire de notre université, avec une prise de fonction au 2 septembre, soit aujourd’hui.

Je veux d’abord remercier le président Georges Haddad, personnalité exceptionnelle, pour ce qu’il a accompli par deux fois au sein de notre université, et plus généralement dans l’enseignement supérieur, et même au-delà. Mon premier acte ce matin comme administrateur provisoire a été de lui proposer de continuer à présider la Fondation Panthéon-Sorbonne qu’il a lui-même bâtie, ce qu’il a accepté, et je m’en réjouis. D’autres témoignages de gratitude ont eu lieu lors de la passation de pouvoirs. Le président Haddad aura assurément et profondément marqué son passage comme président de notre université.

C’est donc à moi que revient désormais, et provisoirement, de présider notre belle université, qui, plus qu’aucune autre, conjugue la masse et l’excellence, avec 43.000 étudiants et 2.500 personnels, et qui constitue la première université d’Europe en sciences humaines et sociales.

La tâche est immense et j’en mesure la grandeur et la difficulté, d’autant que je n’ignore rien du mal-être, sinon de la souffrance, qui la traverse depuis des années. Au moment de prendre mes fonctions, je veux vous assurer que j’exécuterai ma mission avec impartialité, disponibilité et détermination.

Un cap clair pour l’université

En plein accord avec le cabinet de la ministre, le recteur m’a non seulement chargé des affaires courantes de notre université (formation, recherche, campagne d’emplois, projet de budget 2021, budget rectificatif 2020, etc.) mais aussi de deux missions clairement définies : d’une part, mettre en place un processus électoral irréprochable et qui permette une participation la plus large possible afin que la future équipe présidentielle bénéficie d’une légitimité incontestable, et j’en serai bien sûr le garant ; d’autre part, identifier les difficultés conjoncturelles et structurelles que connaît depuis trop longtemps notre université, en résoudre le plus grand nombre et faire appliquer la loi partout où elle ne l’est pas, sans autres considérations politiques que celles qui consistent à faire appliquer la loi. Notre établissement ne peut être instrumentalisé comme résonance à des causes qui ne relèvent pas de ses missions et qui lui sont étrangères.

Au titre de ce strict respect de la réglementation, il me semble tout d’abord essentiel d’assurer la sérénité d’un fonctionnement normal de nos activités et, pour ce faire, de permettre que les bâtiments restent accessibles à tous en permanence. Un protocole de sécurité sera ainsi mis en place dans les jours qui viennent de façon à répondre instantanément à toute velléité d’occupation illégale des bâtiments.

Dans le même ordre d’idées, toutes les structures identifiées comme dysfonctionnelles feront l’objet d’un audit immédiat avec propositions de solutions qui pourront aller jusqu’à leur réorganisation profonde, leur suppression ou leur placement sous administration provisoire déléguée.

Enfin, et toujours dans ce seul objectif de strict respect de la réglementation, j’ai également pris la décision de donner toutes les suites que nécessite le plagiat dont a été victime notre université dans une thèse de doctorat en droit, dont même la presse s’est fait l’écho cet été. J’enverrai donc dès aujourd’hui un courrier au Bâtonnier de l’Ordre des avocats du Barreau de Paris avec transmission de la décision de la section disciplinaire de notre université rendue le 21 juillet, une lettre similaire à la présidente du Conseil National des Barreaux et, enfin, une lettre à l’ancien étudiant pour lui faire défense de continuer à se prévaloir d’un titre dont il ne dispose pas. Mais l’envoi de ces différents courriers, qui montrent combien une institution telle que la nôtre ne peut en aucun cas accepter que de tels incidents s’y produisent, ne suffira pas. Je saisirai donc dans la journée le Procureur de la République de Paris au titre de l’article 40 du Code de procédure pénale et diligenterai une enquête interne qui doit permettre d’identifier les dysfonctionnements administratifs et les pistes d’amélioration que nous mettrons ensuite en œuvre sans délai.

Si ces propos liminaires s’attachent à rappeler combien le strict respect de la réglementation sera au cœur de mon action, c’est parce que je suis particulièrement sensible au prestige, à l’attractivité et au rayonnement de notre université qui, si l’on n’y prend garde, finiront par décliner.

Cette action, à la fois volontariste et pragmatique, je m’emploierai à vous l’exposer, à vous l’expliquer et, surtout, à la voir nourrie par les échanges – même vifs – que nous pourrons avoir dans les semaines à venir.

Communication et dialogue social

C’est la raison pour laquelle de nouveaux canaux de communication seront mis en place et ce, de plusieurs ordres.

Outre le présent message, cette liste de diffusion officielle sera celle de la présidence et celle par laquelle je vous rendrai régulièrement compte de l’avancement de ma mission. Il est également prévu que les personnels reçoivent quotidiennement, et à partir de ce jour, une revue de presse sur les sujets intéressant notre université ou mettant particulièrement en valeur un de ses membres. Parallèlement, une communication libre dédiée aux débats et aux informations venant de l’ensemble de la communauté sera mise en place dans les prochains jours afin que chacun puisse s’y exprimer. Ses modalités ne sont pas encore arrêtées : la liste sera soit une création ex nihilo, soit le prolongement et l’amplification de listes existantes. Une discussion est en cours sur ce point. Quoi qu’il en soit, pour éviter les abus ou les détournements, et pour assurer le pluralisme des opinions, cette communication sera modérée par une personnalité sans lien avec la présidence, connue pour son indépendance d’esprit et sa neutralité, qui agira en toute autonomie. J’ai demandé à la professeure de droit public Anne Levade si elle acceptait cette tâche, ce qu’elle a fait et je l’en remercie.

La communication sera aussi renforcée au quotidien avec la mise en place d’un système de délégués étudiants ou de représentants de promotion dans chaque diplôme, à partir de la deuxième semaine de la rentrée. L’idée est ici d’assurer une meilleure circulation de l’information entre les étudiants et l’équipe enseignante sur des considérations pratiques, et non politiques car il ne s’agit nullement de concurrencer les syndicats. Ces délégués d’amphi, à l’image des délégués de classe du lycée ou de ce qu’on trouve souvent dans les Masters 2, auront pour mission de faire connaître tous les éléments de satisfaction ou d’insatisfaction, lesquels pourront ainsi permettre une réaction immédiate de l’équipe enseignante, de l’UFR ou de la présidence, sans attendre la fin du semestre ou de l’année.

Mais cette information, considérablement renforcée, n’exclut bien sûr en rien le dialogue social. Bien au contraire, elle va l’alimenter et lui permettre, je l’espère, de voir s’exprimer une pluralité de points de vue, une confrontation d’idées et, au bout du compte, une feuille de route qui offrira à l’administration provisoire que je conduis et à la présidence qui sera issue des prochaines élections d’y puiser le terreau de son action.

Je n’oublie pas, en effet, les personnels, notamment de l’administration, tant dans les services centraux, que dans les composantes, que, encore, des bibliothèques, qui ont dû affronter une période particulièrement éprouvante l’année dernière, mais aussi les années précédentes. Un dialogue social global sera engagé sans délai et sans tabou, afin de régulariser ce qui doit l’être, de compenser les difficultés passées pour lesquelles un budget a déjà été dégagé et de bâtir ensemble l’avenir de manière constructive.

Ensemble, préparons l’avenir

Pour ce faire, il importe d’inscrire notre université dans un enseignement supérieur et une recherche qui, depuis plus de dix ans, se sont profondément transformés par un double mouvement d’autonomisation et de regroupements. Une université de Sciences humaines et sociales y a toute sa place, même si c’est une place singulière. Or, si beaucoup de choses ont déjà été faites sans nous, il est encore possible d’y apporter notre pierre. Il est encore possible de tirer toutes les conséquences de ces transformations structurantes à côté desquelles notre université est trop souvent passée. Cela ne signifie pas que nous devions nous en saisir aveuglément et sans discernement, mais que notre université, par son poids, par son histoire et par son identité doit y prendre toute sa part. Une part qui lui ressemble. Une part qui tient compte de ce qu’elle est et de ce que nous voulons pour elle. Une part qui nous permettra de rehausser son prestige qui a pu être écorné ces derniers temps, de mieux rayonner, d’attirer étudiants de qualité et enseignants-chercheurs de renom et, enfin, de renforcer nos ressources financières.

Il n’appartient certainement pas à un administrateur provisoire de prendre des décisions qui outrepasseraient ses fonctions, nécessairement provisoires et à brève échéance. En revanche, il lui appartient de mettre en place des structures susceptibles d’aider les présidences futures à prendre ces décisions et à s’inscrire dans un mouvement qui, qu’on le veuille ou non, doit être embrassé si l’on ne veut pas, à terme, être oubliés.

C’est la raison pour laquelle sera installé dans les prochains jours, en lien avec la direction de la recherche et de la valorisation où une structure existe déjà, un pôle spécifique destiné à porter des candidatures pour les grands projets de financement qui appellent souvent à une auto-évaluation en profondeur et une remise en cause de certains dogmes, quoi qu’on en pense. Ainsi, un nouveau Programme d’Investissement d’Avenir (PIA) va être prochainement lancé par le gouvernement. Les montants en jeu ne se comptent pas en millions, mais en milliards d’euros. Nous ne pouvons plus nous permettre le luxe de continuer à les ignorer. Mais le PIA n’est pas la seule source de financement possible. Le plan de relance du gouvernement qui sera annoncé le 3 septembre en est un autre et ouvre notamment des financements relatifs à de la réhabilitation immobilière. Les soumissions des universités sont attendues pour le 6 octobre et les résultats seront connus le 1er décembre. D’autres appels à projets sont en cours, et il faudra prendre l’habitude d’y répondre de manière systématique car c’est ainsi que se financera l’université de demain.

Une équipe mixte de femmes et d’hommes d’expérience

Pour conduire l’ensemble de ces actions qui me semblent indispensables et urgentes, je ne peux bien sûr pas agir seul. Or, faute de vice-présidents, puisqu’ils ont tous démissionné cet été (à l’exception des vice-présidents étudiants bien sûr) et n’ont pas encore été remplacés, j’ai décidé d’être accompagné dans ma mission par une équipe de haut niveau et mixte : non seulement hommes-femmes bien sûr, mais aussi composée d’autant de personnalités extérieures à notre université que de personnalités qui y sont rattachées, afin de croiser les regards et les expériences.

Ils seront désormais vos référents au cabinet de la présidence pour le temps que durera cette administration provisoire :

  • M. Julien Benini, actuel directeur des affaires financières et du budget ;
  • Mme Alexane Riou
  • Mme Laure Christophe, actuelle directrice de l’enseignement et de la vie étudiante ;
  • Mme Odile Demazy, actuelle directrice des affaires juridiques et institutionnelles.  
  • M. Pierre Desbiolles, Inspecteur général de l’éducation, du sport et de la recherche, qui sera missionné sur le diagnostic, l’état des lieux et la prospective ;
  • Mme Isabelle Gravière, Conseillère-Maître à la Cour des comptes, ancienne directrice adjointe de cabinet du Secrétaire d’État Thierry Mandon, qui apportera son expertise à titre personnel sur les questions budgétaires, financières, immobilières et en matière de système d’information ;
  • Mme Delphine Hedary, Conseillère d’État, en charge du dialogue social et des ressources humaines, de l’organisation des élections et de la sécurité.

Tout en conservant leurs fonctions, les trois directeurs de service central ont accepté, compte tenu des circonstances exceptionnelles actuelles, de l’esprit d’unité qui doit nous animer et d’une ambition partagée, de rejoindre le cabinet de la présidence — ce dont je les remercie vivement. Monsieur Julien Benini sera mon directeur de cabinet, et Alexane Riou, ma directrice de cabinet adjointe.

La direction générale des services continuera bien sûr ses missions, sous l’autorité de Madame Martine Ruaud, avec notamment la directrice générale des services adjointe, Madame Marianne Garcia.

Le secrétariat de la présidence sera renforcé et piloté par Madame Adélaïde Kinkonda, promue cheffe de cabinet, et secrétaire particulière de l’administrateur provisoire. Tous les messages adressés à l’équipe présidentielle doivent l’être au cabinet de la présidence, à l’adresse suivante (cabpresi@univ-paris1.fr), faute de pouvoir être traités.

Naturellement, cette équipe présidentielle ne pourrait agir sans l’ensemble des services administratifs qui ont tous fait preuve d’une réactivité et d’une adaptabilité particulièrement précieuses durant la période de crise sanitaire que nous traversons. Je leur fais toute confiance pour tenir les rênes de notre université pendant cette séquence, quelles que soient les difficultés.

L’équipe opérationnelle resserrée sera appuyée par un conseil politique, représentatif de notre université, qu’ont accepté de rejoindre des enseignants-chercheurs connus ou reconnus dans leur discipline, leur engagement ou leur contribution à notre université, et je les en remercie très sincèrement. Il s’agit de :

  • M. Jean-François Amadieu, professeur de sciences de gestion, Ecole de management de la Sorbonne ;
  • M Alain Duplouy, maître de conférences en archéologie, ancien directeur de l’UFR d’histoire de l’art et d’archéologie ;
  • Mme Joëlle Farchy, professeure de sciences de l’information et de la communication ;
  • M. Bastien François, professeur de science politique, ancien directeur de l’UFR de science politique ;
  • Mme Emmanuelle Kalfon, professeure d’anglais, ancienne directrice du département des langues ;
  • M. Pierre Kopp, professeur de sciences économiques, Ecole d’économie de la Sorbonne ;
  • Mme Anne Le Naelou, maître de conférences en sociologie, ancienne directrice de l’Institut d’études du développement de la Sorbonne ;
  • M. Florian Michel, maître de conférences en histoire, directeur du Centre « Pierre-Mendès-France » ;
  • M. Pierre-Marie Morel, professeur de philosophie, ancien directeur de l’Ecole doctorale ;
  • M. Yann Richard, professeur de géographie, ancien directeur de l’UFR de géographie ;
  • Mme Carine Souveyet, professeure d’informatique, directrice de l’UFR de mathématiques & informatique ;
  • M. Yann Toma, professeur en arts plastiques et sciences de l’art, Ecole des arts de la Sorbonne ;
  • M. François-Guy Trébulle, professeur de droit, directeur de l’Ecole de droit de la Sorbonne.

Ce nouvel organigramme, plus détaillé, est déjà mis en ligne sur le site de l’université ici.

Les conseils centraux et autres organes statutaires de l’université seront bien sûr réunis autant que nécessaire. Et les directeurs de composante seront associés au plus près de la présidence, pour leur proposer une organisation plus décentralisée de notre fonctionnement. Je les recevrai dès demain. Les directeurs d’Instituts et de services communs seront reçus lundi prochain.

De la même manière, la recherche restera autonomisée dans les UFR, les laboratoires et écoles doctorales, la présidence n’ayant aucune légitimité scientifique pour y intervenir, même si la direction de la recherche et de la valorisation continuera à soutenir ce qui mérite de l’être. Une réorganisation de la direction des ressources humaines et de celle des relations internationales sera à l’étude, afin de trouver un bon équilibre entre centralisation et déconcentration.

Enfin, je recevrai lundi prochain les élus des syndicats représentés dans les conseils centraux. Je convierai également dès mardi prochain les candidats à la présidence de l’université pour qu’ils puissent exprimer leurs attentes pendant la campagne qui s’ouvre. Le comité électoral consultatif sera recomposé dès que possible.

Je réunirai enfin régulièrement les responsables administratifs de composante, et je présiderai une fois par mois la réunion des directeurs des services centraux, à partir de celle de ce vendredi.

En revanche, les missions confiées aux chargés de mission sont de droit toutes caduques depuis ce matin puisqu’elles sont rattachées à la personne du président. Ces missions seront confiées, non pas intuitu personae, mais sur la base d’un projet. J’invite donc tous ceux qui sont intéressés, y compris les candidats au renouvellement, à me le faire savoir sous huitaine, en présentant leur projet. Et j’ajoute que trois autres fonctions sont à pourvoir, et le seront là encore sur projet : la direction du site de Port-Royal (Lourcine et René-Cassin), la présidence de la commission des statuts, et, plus tard, la direction du service commun de la formation continue, qui est à pourvoir au 1er novembre prochain. La liste complète des missions et fonctions vacantes est disponible ici.

Une rentrée au service des étudiants

Enfin, n’oublions pas qu’une université est avant tout là pour ses étudiants. C’est dans cette priorité que je place mon action qui vise à lui donner un nouveau souffle.

A toute la communauté de notre université, étudiants et collègues de l’administration, de l’enseignement, de la recherche et des bibliothèques, je souhaite une excellente rentrée, dans le contexte particulier de la crise persistante de la Covid-19 qui oblige à prendre un certain nombre de mesures dont vous serez informés par message séparé. Mais sachez déjà que, conformément à la réglementation nationale, le port du masque est obligatoire dans tous les bâtiments de notre université, tant pour les étudiants que pour les personnels. Des masques en tissu lavables, aux couleurs de l’Université, seront fournis gratuitement à tous les personnels et à tous les étudiants.

Pour finir ce trop long message, c’est justement à eux que je veux surtout m’adresser, particulièrement aux 13.951 nouveaux étudiants qui rejoignent notre université cette année, mais aussi aux nouveaux collègues, enseignants, enseignants-chercheurs et membres de l’administration, pour leur dire que l’avenir, je le sais, leur donnera raison d’avoir choisi notre université, qui est désormais aussi la leur. Qu'ils soient les très bienvenus.

Très bonne rentrée à tous.

Thomas Clay
Administrateur provisoire de l’université
2 septembre 2020